Et c'est reparti.
C’est l’heure. La douleureuse heure. L’heure qui fait mal après plus de trois mois de vacances, ou pour beaucoup de travail. L’heure, dont tu aurais aimé qu’elle soit plus tard, alors qu’en réalité, elle a lieu avant même les L1. L’heure de plier bagages et de prendre l’avion, le train, pour revenir dans sa ville. L’heure de la rentrée.
Cette rentrée n’est pas comme
celle de l’année dernière
Le début d’une nouvelle ère.
Les rentrées ne sont jamais ordinaires, mais celle-ci est unique : mon premier jour à l’université de Bordeaux.
. Ici, moins d’appréhension, car l’Université est désormais connue, et il ne devrait pas y avoir de grand changement. Les études reprennent pour une année supplémentaire, la deuxième d’une longue série encore. La réunion de rentrée peut même paraître comme une formalité, les étudiants s'étant déjà accoutumés
au changement de semestre
On change tout, et on recommence.
Les partiels finis, l’heure est déjà venue de reprendre les cours, et d’enchaîner avec le deuxième semestre. Et de tout recommencer.
, de classe, d’emploi du temps.
Mais non. Une rentrée reste toujours angoissante, pour ne pas dire stressante, surtout à l’université : ce semestre encore plus, les cartes ont été rebattues, et les étudiants se sont encore plus séparés. Cette fois-ci, les étudiants sont dans leur mention de licence, et les promotions sont de plus en plus réduites. De plus, l'été est passé : la fac a peut-être changé, les habitudes ont potentiellement été perdues, les amis n’ont pas été revus depuis des mois, et il faut gérer papiers, réinscription à l’université, affaires à déménager… Il va falloir se réhabituer, car les cours commencent dès la rentrée.
Reprise douce
À l’Université de Bordeaux comme dans beaucoup d’autres, la rentrée des L1 se fait après celle des L2 & L3. Il y a plusieurs raisons à cela, notamment la volonté de laisser du temps supplémentaire pour la quête de logement, l’installation dans la ville ; car les inscriptions peuvent être tardives, avec feu-APB comme avec Parcoursup ; mais surtout car les groupes de TD ne sont pas encore faits, dépendant des effectifs, et que les néo-étudiants n’auront presque aucun amphi au premier semestre. C’est ainsi qu’alors que les néo-bacheliers auront leur réunion de rentrée vendredi, pour commencer les cours la semaine prochaine, les autres étudiants commencent… dès la rentrée, ou presque.
La date de rentrée n’est en effet pas la même pour tout le monde, et dépend de la filière des étudiants. C’est à eux d’aller la chercher sur le site de l’université, ou souvent par du bouche-à-oreille. Encore faut-il qu’elle soit vraie… En effet, durant l'été, les étudiants déjà inscrits administrativement ont reçu un e-mail leur indiquant la date de la réunion de rentrée… différente de celle annoncée par l’université. Pour ajouter du fil à retordre, lors de la sortie des emplois du temps, étant donnés que les groupes ne sont pas encore donnés, les étudiants se perdent entre les différentes dates de réunions de rentrée, qui ne les concernent pas…
Rentrée le lundi pour les L3, le mardi pour ma part en mention mathématiques, le jeudi pour la mention informatique (alors que le site parlait du lundi)… la reprise est douce à la fac, et le moteur de la dynamique étudiante met du temps à démarrer. Dans les jours qui précédent la rentrée, même l’emploi du temps, disponible sur Internet, s’emballe. Les groupes ne sont pas définis, pas écrits — c’est à l'étudiant de le deviner à partir de ses choix de filière — mais déjà sont planifiés les premiers cours… avant même la réunion de rentrée. Les UE s’affichent et se cachent, à tel point que dans mon groupe, le premier cours ayant lieu le mardi a disparu… la veille au soir, sans que l’enseignant en soit à l’origine. La première semaine n’est au final constituée que de cours, de quelques amphis sur chaque matière, car les groupes de TD… n’ont pas encore été effectués — plus tard, le responsable de la mention me dira la raison : les effectifs ne sont même pas bouclés au moment de la rentrée. Inscriptions tardives, redoublants : tout ceci enraye la machine, et pas qu’en seconde année. La semaine qui suit, la responsable de mention qui avait affiché une liste d’une cinquantaine de personnes dans sa filière en L1, rendra l’amphi bondé grâce aux transferts d'étudiants…
Mais ce lundi, ma tête est ailleurs : au déménagement, ou plutôt au renménagement de mes affaires dans mon logement bordelais. C’est le cas pour beaucoup : les vacances sont terminées et il est temps de revenir dans son chez-soi. Certains ont laissé leurs affaires dans le logement qu’ils ont continué de payer durant l'été… d’autres profitent de la trêve pour déménager, en laissant les affaires chez des amis, comme chez moi. Ce lundi est alors un jour de grand ménage et de réinstallation, pour prendre ses quartiers en vue de cette nouvelle année. Car rien de mieux pour bien travailler que de se sentir bien chez soi…
Réunion de rentrée et puis s’en va
8h d’après le site de l’Université, 9h30 d’après l’emploi du temps… Pas même commencée, la réunion de rentrée est déjà problématique. Et, en ce mardi 3 septembre, tout le monde n’est pas au courant, avec une trentaine de personnes entendant dans un amphithéâtre vide, au lieu de la réunion de rentrée d’après l’Université. Les minutes passent, les gens se parlent ou sont sur leur téléphone portable, certains rentrent… mais personne ne sort, peut-être de peur que l’enseignant soit en retard, et car une réunion de rentrée, cela ne se rate pas.
De l’autre côté d’une voie automobile, une poignée d'étudiants de la promotion attend dans un amphithéâtre avec enseignant : celui qui a vu son cours supprimé la veille. Avec un peu de rancœur, il ne fait logiquement pas cours — les fonctions à plusieurs variables attendront.
Il est 9h30 et cette fois-ci, c’est la bonne : les étudiants entrent dans l’amphithéâtre Poincaré, celui de la réunion de rentrée, avec à sa tête, l’enseignant-chercheur, responsable de la mention, responsable de l’année. L’amphithéâtre se remplit… un peu. En tout, une soixantaine de têtes sont présentes dans l’amphi. Pendant un court instant, j’ai le souvenir de la réunion de rentrée de l’an dernier en tête, où le même amphi était bondé, surchargé, plein à craquer, laissant des gens à l’arrière pendant une heure. « Rassurez-vous, ce sera la dernière fois » qu’ils nous disaient. Ils avaient raison.
Première chose qui change de l’année dernière : le conférencier fait passer une fiche d'émargement dans l’amphithéâtre, pour vérifier les présents, et également faire inscrire ceux qui ne sont pas inscrits administrativement à l’université (et ils sont nombreux*). L’inscription administrative à l’Université est nécessaire à l’inscription pédagogique, et des problèmes ont eu lieu cette année, avec des étudiants inscrits tardivement à l’Université malgré avoir rempli les formulaires nécessaires. Avec en prime, des conséquences sur les bourses ou réductions étudiantes… Quelles conséquences ? Aucune idée, mais cela permet d’avoir un ordre d’idée de la taille de la promotion, qui n’atteint visuellement pas la centaine de noms. Sans compter les personnes qui se rajoutent tardivement…
Puis l’enseignant-chercheur évoque les modalités d’examen, et le planning pour les prochaines semaines : 3 UE majeures, 3 UE traverses, mais également une UE — sport ou théâtre — à choisir et à commencer dès ce semestre, mais dont la note ne comptera que pour le quatrième. Et moi qui me pensais loin de l'EPS… 😦
Menus de sport (entre combat, badminton, cross training ou rugby flag), explications des UE à choix, présentation des dispositifs d’accompagnement et des associations étudiantes, rien n’est oublié visiblement… et pourtant, au bout de 45 minutes, la réunion est bouclée. Tous les sujets sont vite passés, loin des heures de monologue de certains enseignants-chercheurs vendant leur filière, lors de réunions de l’année précédente.
Les étudiants partent alors… ou restent, pour quelques-un, voyant des têtes familières au milieu de la soixantaine d’inconnus. Eux, ce sont des gens de l’an dernier, qui sont dans ma promotion — puis, in fine, dans mon groupe de TD, que l’on ne connaîtra que le week-end suivant. Quatre personnes avec qui je peux parler, sur qui les regards peuvent se poser sans que cela soit cringe. Quatre personnes aussi avec qui j’ai des contacts, car c’est important à l’université, sans quoi les informations ne sont que peu relayées. Quatre personnes, sur la soixantaine que j’ai cottoyé durant la première année, c’est peu. Mais c’est déjà ça.
Il est 10h20 et les étudiants sont donc partis, et l’amphithéâtre est presque vide. À l’extérieur, des flux de quelques étudiants, mais pas de grandes plèbes comme l’an dernier. Après la réunion de rentrée… aucun cours n’est prévu de la journée, et les étudiants sont donc rentrés, comme on pouvait se l’imaginer. Et vu que les groupes de TD ne sont pas encore formés, rares sont les enseignements cette semaine. La fac est presque vide, étrange vision lors de cette semaine de rentrée.
Du pain et des jeux
Cette fin de journée — alors qu’il n’est même pas midi — me permet de me promener dans le campus, et de découvrir les nouveautés de cette année universitaire, les changements qui ont eu lieu durant l'été pour faire un nouveau campus. Certains se réjouiront de la réouverture du parc-relais situé à côté de la faculté, fermé depuis le début d’année car s'étant affaissé ; certains déploreront la réservation du parking de la fac aux étudiants — un problème pour ceux qui ne l’ont pas sur eux, et doivent faire des 180° pour rebrousser chemin.
Dans le bâtiment principal de la licence, quelque chose m’interpelle : je me souviens en effet que la caféteria, fermée depuis la fin de l’année étudiante précédente « pour cause de travaux » doit réouvrir le jour-même. J’ile file donc… et grand étonnement, dans le mauvais sens du terme : l’ancienne caféteria a laissé place à un « Market », autrement dit une petite surface où les étudiants viennent se servir des plats. À la clé, moins de personnel peut-être, mais surtout moins de place… et plus de billard :(
Mais c’est au RU, le restaurant universitaire, également géré par le CROUS, que vient du désarroi, voire de la colère. Car en arrivant au RU, qui lui n’a que peu changé (mis à part des haies coupées), et alors que je prenais mon repas habituel… rien ne va plus : j’apprends que le pain est désormais payant.
« Votre CROUS s’engage et vous propose tous les jours du pain 100% bio, 0,10€ »
Une honte, une indignité, que dis-je, un blasphème : il n’en faut pas plus pour me voir courroucé, car pour 5 centimes de plus que l’an dernier, le prix d’un repas RU n’inclut plus un pain jusqu’alors offert, et qui était considérablement plus important avant que cette année en supplément. « On n’y peut rien, mais c’est nous qui prenons » la colère des usagers, me dira la caissière du restaurant universitaire.
10 centimes de plus pour ça... pic.twitter.com/OJvFEqbl6i
— Adrien ☀️ (@AdrienChd) September 4, 2019
Ce n’est pas le seul changement du RU : en plus des cinq centimes et du pain, les pâtisseries sont également devenues payantes, et entièrement en supplément, alors que jusque l’an dernier, il était possible de prendre une pâtisserie et un plat pour le prix d’un repas. Les points de fidélité, spécificité de la région, sont également dévalués, le CROUS abandonnant les chèques cadeaux pour les étudier au profit de mugs… ou donnant des places de cinéma contre 300 € dépensés ! Et pour finaliser la chose, à la caféteria cette fois-ci… les couverts sont désormais payants, au prix de 5 centimes l’ustensile ! Par ticket RU, on désigne le prix d’un repas au restaurant universitaire traditionnel.
Toutes ces surprises ont eu le don de m'énerver, car non annoncées et surtout entièrement en défaveur des étudiantes et étudiants. Surtout, alors que l’augmentation du ticket RU* est réglée au niveau national, annoncée par les médias et est surtout normale vu l’inflation (quoique plus forte que celle-ci*
De 2€20 lors du passage à l’euro, le ticket RU a augmenté de cinq centimes constamment jusqu’en 2015, soit plus que l’inflation… Mais le gel ces derniers années a rattrapé l’effet.
Source : La restauration universitaire, Rapport de l’institut général des finances, 2013 (page 126)
), ces différentes augmentations ne viennent que d’une décision régionale cachée et non annoncée (les délibérations des CA n'étant pas publiées à ma connaissance), et les étudiants n’auront que leurs yeux (et les commentaires Facebook) pour pleurer.
Et c’est reparti pour un tour
La ville, Bordeaux, elle n’a que peu changé. La ligne C du tramway est toujours coupée entre le hub principal de la ville et la gare, à la suite d’un incendie vraisemblablement criminel d’un parking sur lequel circulaient les rames. Un flux incessant de personnes sort des bus relais, mis à disposition toutes les cinq minutes, avançant vers la gare telle une armée voulant conquérir le prochain train. Nombreux sont les vélos qui sont toujours aussi mal garés, la faute à un manque de stationnement en gare Saint-Jean. Les agences TBM sont pleines, archi-pleines, sur le campus, à Quinconces comme en gare. Et toujours les travaux en cœur de ville, même si félicitons-nous de la fin de la rénovation de la place Nansouty.
Mais mine de rien… cela fait plaisir. Le retour dans sa ville est un soulagement, un petit bonheur après deux mois dans sa campagne. Les vélos roulent, les meubles sont installés, et les cours peuvent recommencer.
Le premier vrai cours aura lieu le lendemain, avec l’enseignant que j'étais censé avoir eu le jour-même. 9h30, et les étudiants s’installent dans un amphithéâtre clairsemé, pour un cours d’analyse. Même pas le temps de se présenter, l’enseignant démarre déjà ses cours en reprenant quelques notions d’algèbre de l’année précédente. Puis prévient : « Je préviens, je vais vite… et vous suivez. » Bonne ambiance, dans cet amphi probablement plus silencieux qu’un enterrement, où seuls les bruits des stylos, et surtout de la voix de l’enseignant, sont audibles. Les étudiants ne se parlent pas, quand bien même certains se connaissent car venant d’un même groupe de TD l’année passée (c’est généralement plus facile pour ceux qui avaient suivi les options 100% mathématiques l’an passé…). Et quand l’enseignant écrit mal, et que l’amphi n’arrive pas à lire… personne ne demande à celui-ci, et les étudiants supposent, essaient, mais hésitent à demander confirmation à leurs prochains qu’ils ne connaissent pas.
Tout cela ne fait probablement parti que d’un cycle. Comme au premier semestre, comme au deuxième semestre, les étudiants doutent, ne parlent pas entre eux aux premiers abords, ne cherchant pas vraiment à se connaître, puis des affinités se feront dans les prochains jours, les prochaines semaines, et il y aura là une vraie ambiance de promotion. À la différence près que celle-ci se réduit comme peau de chagrin, et que dès le semestre prochain, la promotion ne sera plus… qu’un groupe de TD, qui restera ensemble jusqu'à la fin. Enfin, c’est ce que l’on nous a dit.
Le soir arrive, et avec le cours d’anglais qui rassemble la promotion du premier semestre. Viennent les retrouvailles, les échanges à propos de cette rentrée, des vacances passées ou surtout des problèmes de l'été. L’atmosphère ici s’est vite réchauffée, et c’est avec plaisir que l’on a à discuter avec ces gens qui sont partis vers d’autres horizons — physique, chimie, informatique — mais avec qui nous sommes proches. D’ores-et-déjà, rendez-vous est pris au RU le lendemain pour discuter tout en mangeant des bons plans (sans pain, vous l’aurez compris).
En sortant du cours, on discute, on papote alors que le Soleil baisse sur le parking de la fac. On y évoque l’année à venir aussi, le week-end d’intégration qu’il va falloir commencer à organiser (à suivre…™️), ou la vie au pays. Et lorsque l’on veut se dire au-revoir, un petit coup d'œil vers le tram… qui affiche « Peixotto ». Le tram est coupé entre Saint-Nicolas et Peixotto, suite à une rame en panne. Pas de doute, une nouvelle année vient de démarrer.